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L’ Antiquité tardive dans l’Est de la Gaule Sépultures, nécropoles et pratiques funéraires en Gaule de l’Est Actualité de la recherche II Textes réunis par Nathalie Achard-Corompt, Michel Kasprzyk, avec la coll. de Bérangère Fort Institut Institut Institut national national national dede recherches de recherches recherches REVUE REVUE REVUEARCHÉOLOGIQUE ARCHÉOLOGIQUE ARCHÉOLOGIQUEDE DE DEL’EST L’EST L’EST I Quarante et unième supplèment I Dijon 2016 L’ANTIQUITÉ TARDIVE DANS L’EST DE LA GAULE, II Sépultures, nécropoles et pratiques funéraires en Gaule de l’Est Actualité de la recherche Actes du colloque de Châlons-en-Champagne 16-17 septembre 2010 REVUE ARCHÉOLOGIQUE DE L’EST Quarante et unième supplément L’ANTIQUITÉ TARDIVE DANS L’EST DE LA GAULE, II Sépultures, nécropoles et pratiques funéraires en Gaule de l’Est - Actualité de la recherche Actes du colloque de Châlons-en-Champagne 16-17 septembre 2010 Textes réunis par Nathalie AchArd-corompt, Michel KAsprzyK, avec la coll. de Bérangère Fort Ouvrage édité par la Société Archéologique de l’Est et la Société Archéologique Champenoise dans le cadre de l’UMR 6298 ArTeHiS de l’Université de Bourgogne avec le concours du Ministère de la Culture et de la Communication (Direction régionale des Affaires Culturelles de Champagne-Ardenne) et de l’Institut national de Recherches archéologiques préventives Dijon, 2016 SOMMAIRE Avant-propos.................................................................................................................................................................... 7 THÈME N° 1 : NÉCROPOLES DE L’ANTIQUITÉ TARDIVE DANS L’EST DE LA GAULE Belgique II Cécile Paresys, Isabelle Le Goff avec la part. d’Anne Delor-Ahü, Aurore Louis, Bérangère Fort Espaces funéraires et mobiliers en Champagne-Ardenne durant l’Antiquité tardive ........................................................ 11 Jean-Jacques Charpy Les nécropoles de l’Antiquité tardive dans la Marne d’après les archives et les collections ........................................... 35 Stéphane Sindonino, Magali Cavé, Sandrine Thiol, avec la coll. de Pierre Mathelart, Michaël Brunet et Philippe Rollet Les sépultures tardo-antiques de la fouille du tramway à Reims (Marne)........................................................................ 45 Aminte Thomann, Sébastien Péchart, Sylvain Renou , Amélie Pelissier, Élise Henrion Les pratiques funéraires de la nécropole du 43 rue de Sébastopol à Reims (Marne)....................................................... 61 Nathalie Achard-Corompt Deux nécropoles du Bas-Empire à Bezannes « sites K et L » (Marne) ............................................................................. 69 Nathalie Soupart Les pratiques funéraires de l’Antiquité tardive dans le sud de l’Aisne : au travers des exemples des nécropoles de Limé (Les Sables Nord) et de Ploisy (Le Bras de Fer) ................................................................................................. 79 Belgique I Michiel Gazenbeek, Arnaud Lefèvre, Karine Michel La place du mobilier dans les pratiques funéraires de l’Antiquité tardive en Lorraine ................................................. 103 Lyonnaise I & IV Michel Kasprzyk, avec la coll. de Yannick Labaune et Frédéric Devevey Sépultures, monuments funéraires et nécropoles de l’Antiquité tardive dans la partie centrale de la province de Lugdunensis prima (Lyonnaise Première, cités des Éduens et de Chalon, in du IIIe – milieu du Ve siècle)........................................................................................................................................ 121 Sylvie Balcon-Berry, Walter Berry Le site de Saint-Pierre-l’Estrier d’Autun (Saône-et-Loire) dans l’Antiquité tardive : remarques sur le rapport entre l’évolution cimétériale et le cadre architectural ........................................................... 155 Mélody Félix-Sanchez, David Cochard Premiers résultats sur l’ensemble funéraire du Bas-Empire de la ZAC d’Échenilly (Saint-André-les-Vergers, Aube) ...................................................................................................................................... 179 Michaël Brunet, Grégory Schütz, Mélody Félix-Sanchez, Sylvain Renou La parure et les accessoires vestimentaires de la sépulture 137 de la ZAC d’Échenilly................................................. 187 Laurent Fournier, Marie-Pierre Chambon, avec la coll. de Anna Moirin, Dominique Canny, Jean-Louis Roche et Frédéric Périllaud Un ensemble funéraire de la in du IVe siècle découvert à Marigny-les-Usages (Loiret)................................................ 191 Germanie I Émilie Cartier-Memmie, Olivier Putelat IIttenheim ‘Lotissement du Stade’ (Bas-Rhin) : une nécropole du Bas-Empire (350-450 après J.-C.) et ses dépôts funéraires d’origine animale ...................................................................................................................... 201 Séquanaise Lydie Joan Bilan sur les nécropoles du Bas-Empire en Franche-Comté........................................................................................... 225 Viennoise Gaëlle Granier, Michel Signoli, Benoît Helly Évolution de la topographie et de la nature des lieux funéraires de la ville antique de Vienna durant l’Antiquité tardive ................................................................................................................................................ 239 Gaëlle Granier, Benoît Helly, Michel Signoli De potentielles inhumations de collegia à vocation funéraire : la population tardive du site de La Place de l’Égalité (Sainte-Colombe, Rhône)................................................................................................................................................. 255 THÈME N° 2 : ACTUALITÉ DE LA RECHERCHE SUR L’ANTIQUITÉ TARDIVE DANS L’EST DE LA GAULE Belgique II Pierre Mathelart, Guillaume Florent avec la coll. de Ludivine Huart Les apports de la céramologie à la connaissance de l’évolution urbaine de Reims durant l’Antiquité tardive ............. 263 Laurent Duvette, Sonja Willems L’habitat de Menneville (La Bourguignotte) (Aisne) ...................................................................................................... 323 Christophe Hosdez, Alexia Morel Une occupation de l’Antiquité tardive en bord de voie à Goussancourt (Aisne) ............................................................ 343 Régis Bontrond, Ludivine Huart, Frédéric Poupon Un exemple d’occupation d’une campagne péri-urbaine : le site de Bezannes, Le Bas Torchant orchant (Marne) ................... 355 Benoît Filipiak Découvertes monétaires à Bezannes (Marne), lors des fouilles préventives IInrap de 2006 à 2009 : remarques sur la circulation monétaire tardo-antique dans la campagne rémoise ........................................................ 363 Belgique I Sébastien Jeandemange, Fabrice Charlier, Julian Wiethold, Jean-Denis Lafite La tuilerie antique de Hombourg-Budange (Moselle)..................................................................................................... 389 Francesca Schembri Un établissement gallo-romain en bordure de la voie impériale de Lyon à Trèves à Lesménils «Notre-Dame / Chêne Brûlé» (Meurthe-et-Moselle)........................................................................................................ 411 Lyonnaise I & IV Matthieu Poux, Tony Silvino avec la coll. de Patrick Bernard, Sandra Dal Col, Amaury Gilles, Lucas Guillaud, Aurélie Tripier Les formes de l’habitat dans les campagnes lyonnaises durant l’Antiquité tardive : données anciennes et récentes... 429 Sylviane Estiot, Vincent Drost, Maxence Segard Le double trésor monétaire de Magny-Cours (Nièvre).................................................................................................... 465 Alexandre Burgevin Un ensemble de monnaies tétrarchiques trouvé dans la Saône à Montbellet (Saône-et-Loire), reliquat d’un dépôt monétaire ?....................................................................................................................................... 483 Stéphane Joly, Christian Cribellier, Alix Fourré, Gaëlle Robert L’occupation tardive de l’agglomération de Bonnée (Loiret) : l’habitat IIIe-IVVe siècles de la rue des Sentes.................. 491 Belgique I & II, Germanie II Jean-Marc Doyen La in de l’administration romaine de la moyenne vallée mosane : essai de modélisation de l’alimentation en numéraire entre 390 et 450 ap. J.-C. .......................................................................................................................... 501 LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) Sébastien JEANDEMANGE *, Fabrice CHARLIER **, Julian WIETHOLD ***, Jean-Denis LAFFITE **** Mots-clés Tuilerie gallo-romaine, chaîne opératoire, four, halle, puits, restitution architecturale, archéomagnétisme, radiocarbone, anthracologie, carpologie, matériaux de construction en terre cuite. Keywords Gallo-Roman brickyard, production chain, kiln, hall, well, architectural analysis, archaeomagnetism, radiocarbon dating, charcoal analysis, plant macrofossil analysis, terracotta building material. Schlüsselwörter Gallo-römische Ziegelei, Produktionskette, Brennofen, erkhalle, Brunnen, architektonische Rekonstruktion, Archäomagnetismus, Radiokarbondatierung, olzkohleanalyse, Archäobotanik, Baukeramik. Résumé La fouille archéologique entreprise par une équipe1 de l’Inrap en 2006 sur Le Clos des Tourelles à Hombourg-Budange (Moselle) a mis au jour une tuilerie gallo-romaine située à proximité d’un site médiéval, objectif initial de l’opération. La durée d’occupation du site antique est dificile à préciser, seul l’abandon pouvant tre daté. Il est sans doute postérieur à 250 ap. J.-C. Les vestiges de la tuilerie sont divers : four, drains, halles, puits, petit bâtiment… Le plan général et la nature des différentes structures de production permettent de suivre la chaîne opératoire et témoignent d’une organisation rationnelle du travail. Plusieurs études spéciiques ont été effectuées ain d’enrichir la compréhension du site : datations archéomagnétique et radiocarbone, études carpologique et anthracologique, étude du mobilier céramique : poteries et matériaux de constructions en terre cuite, et enin analyses fonctionnelle et architecturale de la tuilerie. Abstract The archaeological excavation undertaken in 2006 by the Institut national de recherches archéologiques preventives (Inrap) at the site Le Clos des Tourelles in ombourg-Budange (Moselle, rance) unearthed a Gallo-Roman tilery. It situated close to a medieval site, the initial target of the excavation project. The time span of the Gallo-Roman occupation cannot be stated with accuracy ; only its abandonment can be dated to be later than 250 AD. The remains of the tilery are assembling a kiln, drains, a hall, a well, and, among other features, a small building. The plan and arrangement of the different features are représenting the whole working process of the tile production and, additionally, they are giving evidence of an eficient organization of the work. Several studies were carried out to increase our knowledge of the site : archaeomagnetic and radiocarbon dating, plant macrofossil and charcoal analysis, a study of the ceramics and of burnt clay building material, and, not to forget, a functional and architectural study of the tilery. (trad. J. Wiethold) Zusammenfassung Bei einer Grabung des Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) wurde 2006 am undplatz Clos des Tourelles in ombourg-Budange (Departement Moselle) in der Nähe einer mittelalterlichen Siedlung, der die Grabung ursprünglich galt, eine gallo-römische Ziegelei freigelegt. Die Dauer der antiken Besiedlung des Platzes ist schwer zu bestimmen ; nur seine Aufgabe kann mit großer ahrscheinlichkeit in die Zeit nach 250 n. Chr. datiert werden. Die interlassenschaften der Ziegelei sind zahlreich : Brennofen, Entwässerungsgräben, erkhallen, Brunnen sowie ein kleines Gebäude Der Grundrissplan der Anlage und die nachgewiesenen Produktionsstrukturen erlauben es, die Arbeitsschritte im Einzelnen genau zu bestimmen. Sie zeugen von einer rationellen Organisation der Ziegelproduktion. Um den undplatz und die Arbeitsabläufe genauer zu verstehen, wurden zu bestimmten Themenbereichen gesonderte Untersuchungen vorgenommen: archäomagnetische Datierungen und Radiokarbondatierungen, die Analyse verkohlter und unverkohlter Samen und rüchte sowie der olzkohlen, die Untersuchung der Keramikfunde sowie der Baukeramik und schließlich wurde eine funktionale und architektonische Analyse der Ziegelei durchgeführt. (trad. J. Wiethold) * Responsable de l’opération de fouille ; Inrap Grand-Est nord, Base archéologique de Ludres, 95 impasse Becquerel, 54710 Ludres. sebastien.jeandemange@inrap.fr ** Archeodunum, Agence du Mont Beuvray, Centre archéologique européen, 58370 Glux-en-Glenne, f.charlier@archeodunum.fr *** UMR 6298 ArTeHiS, Université de Bourgogne - Inrap Grand-Est nord, Centre archéologique de Metz, Laboratoire archéobotanique, 12 rue de Méric, 57063 Metz cedex 2. julian.wiethold inrap.fr **** Inrap Grand-Est nord, Centre archéologique de Metz, 12 rue de Méric, 57063 Metz cedex 2. jean-denis.lafite inrap.fr 1 Équipe de fouille composée de Lonny Bourada, Sébastien Jeandemange et Philippe Klag. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE 1. INTRODUCTION (S.J.) 1.1. Contexte géographique, géologique et archéologique La commune de Hombourg-Budange (Moselle) se situe dans la vallée de la Canner, à 15 km au sud-est de Thionville. Le projet de lotissement Le Clos des Tourelles, à l’origine de la fouille, est localisé à moins de 150 m au sud-est du centre du village et à 400 m à l’est du château de Hombourg (ig. 1). Le site étudié est implanté sur les terrains sédimentaires du plateau lorrain à l’est du Bassin parisien. Le terrain naturel se compose d’argiles bariolées et de marne calcaire du Keuper moyen. Outre la zone argileuse exploitée par la tuilerie antique présentée ici, le secteur de Hombourg-Budange possède d’autres gisements présentant des caractéristiques recherchées par l’artisanat des céramiques. Au début des années 90, un atelier de céramique sigillée a été repéré en prospection pédestre, au lieu-dit la Grande Corvée, à moins de 250 m à l’est de la présente tuilerie. La quantité importante de mobilier archéologique fournit une date d’occupation de l’oficine de la seconde moitié du IIe siècle jusqu’au Bas-Empire. La céramique sigillée recueillie est datable de la seconde moitié du IIe siècle et la céramique commune des IIIe, IVe et Ve siècles. Pour l’exportation des productions, cet atelier est à mettre en relation avec la voie romaine reliant Metz à Trèves par la rive droite de la Moselle (GÉRARD, 1999, p. 350 et 359). De même, une tuilerie (d’origine médiévale ?) est située à 700 m au sud du village et est encore igurée sur le cadastre napoléonien de 1812. 1.2. Présentation du site La fouille couvre une surface de 2620 m², avec une topographie accusant une légère pente orientée NE-SO (ig. 2A). uatre périodes chronologiques ont pu être distinguées. La première est matérialisée par quelques fosses et tessons de céramique protohistorique au sens large. Seul un bord de céramique est attribuable au second Âge du Fer (La Tène). La seconde période, présentée ici, concerne une tuilerie gallo-romaine. Une troisième période est représentée par une unité rurale médiévale dificile à caractériser, se composant d’un bâtiment à fondation sur solin, de vestiges d’un bâtiment sur tranchée de fondation et d’un fond de cabane (XIIIe-XVe siècles). Enfin, l’inhumation de chevaux de trait marque une occupation plus récente (XIXe-XXe siècles) (JEANDEMANGE et alii, 2009). 2. LE FOUR ET SES AMÉNAGEMENTS PÉRIPHÉRIQUES (S.J.) 6 3 4 2.1. Présentation 1 7 2 5 Extrait de la carte IGN 3412 Est 0 500 m Metz Contexte archéologique : Bar-le-Duc Nancy 1 - Tuilerie antique et occupation médiévale faisant l’objet de la fouille. 2 - Atelier de céramique sigillée, au 0 lieu-dit Grande Corvée. 3 - Château XIIIe-XXe siècles 4 - Chapelle XVe siècle 5 - Tuilerie d’origine médiévale ? moderne ? 6 - Village de Hombourg cité dès le XIIe siècle 7 - 1997 : Sondages archéologiques négatifs, au lieu-dit Guff. Épinal 50 km Fig. 1. ombourg-Budange (Moselle), Le Clos des Tourelles. Localisation générale. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. 390 Les facteurs géologiques, hydrologiques et paléoenvironnementaux rencontrés sur l’actuelle commune de Hombourg-Budange sont favorables à l’implantation d’une tuilerie. En premier lieu, le terrain naturel, observé sur la fouille, est formé notamment d’argile compacte de couleur gris clair qui constitue un gisement propice à la fabrication de céramiques. La proximité de l’eau est également primordiale : un puits a été découvert et un petit cours d’eau est localisé à moins de 100 m au sud du site. Enin, la présence de matières combustibles s’avère indispensable. Deux importantes forêts, celles dites du « Bois du Comte » et de la « Forêt du Comte », se situent à quelques centaines de mètres au nord, à l’est et au sud-est du présent atelier et de l’oficine de céramique sigillée. Elles sont constituées de feuillus dominés par le chêne et le hêtre. Même si l’état des forêts dans l’Antiquité reste dificile à déterminer, on peut imaginer que ces sources ligneuses ont pu être exploités pour fournir le combustible du four (GÉRARD, 1999, p. 349). L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) nale mmu X=891600 X=891550 X=891500 Y=185050 n° 1 Y=185050 co Voie Place des Remparts 106 105 174 173 131 132 171 107 104 170 96.00 Chemin rural 95.00 130 Y=185000 99.0 0 97.00 172 128 Section 2 Y=185000 169 175 103 168 129 149 .00 99 133 .00 98 Y=184950 Y=184950 2 Emprise diagnostic : 13 387 m .0 Emprise fouille : 2 620 m Sondage négatif diagnostic Sondage positif diagnostic 56 .00 .00 94 0 96 95 55 109 97 Section 33 2 .00 X=891600 X=891550 Structures antiques Structures médiévales Structures non datées ou récentes 0 20 m 97 N GF 98 N GF A 99 NG F 8 structures antiques 6 7 structures non datées 5 2 4 3 1 B 3 0 10 m 1 - four de tuilier 2 - halle de plan centré 3 - drain 4 - halle de plan allongé 5 - aire de séchage ? 6 - puits 7 - poteau (associé au puits ?) 8 - bâtiment à quatre gros poteaux (atelier ?) Fig. 2. A. Plan de fouille sur le cadastre actuel ; B. plan de la tuilerie antique. Auteurs : S. Calduch, T. Ernst et S. Jeandemange, Inrap. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 391 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE lim ite de déc ? apa in dra ge contrefort ? conduit latéral de chauffe couloir aire de service central voûté muret de soutènement massif latéral contrefort ? 80 73 72-1 72-2 drain Sud Nord laboratoire restitué aire de service 99 m 98 m carneaux gueule imbrices 97 m sole restituée voûte effondrée 96 m NGF 95 m alandier Coupes poteaux et drain 73 72-1 94 m chambre de chauffe foyer 72-2 Maçonnerie en terre cuite architecturale 80 Matrice argileuse avec pierres en grés et fragments en terre cuite architecturale Substrat (argile verte) rubéfié 0 2m Substrat (argile verte) 0 2m Fig. 3. Plan et coupe longitudinale du four. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. 392 L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) Le four de tuilier se situe à l’extrémité sud-ouest du décapage archéologique, en limite d’emprise. Lors du décapage à la pelle mécanique, la structure est apparue comme un épandage sans organisation apparente, composé d’innombrables fragments de tuiles gallo-romaines associés à quelques traces de rubéfaction. L’épandage offre alors une longueur maximale d’environ 13 m pour une largeur comprise entre 5 et 7 m, soit une surface d’environ 70 à 75 m² (fig. 13). Suite à un nettoyage manuel effectué en plan, suivi de trois sondages creusés à la mini-pelle, la partition du four est apparue clairement (infra, ig. 14). Tout comme une cave, un four de tuilier est une structure creusée dans le substrat. Ce phénomène d’excavation explique le bon état de conservation de ce type d’aménagement. De plus, lors du diagnostic archéologique, aucun sondage n’est venu perforer les parties maçonnées du four, seule l’aire de service ayant fait l’objet d’un sondage (ig. 2A). 2.2. Aire de service Située à l’extrémité méridionale du four, l’aire de service est un espace creusé dans le substrat argileux et aménagé devant le four, face à la bouche de l’alandier. C’est sur celle-ci que se tient l’ouvrier, appelé chauffeur, qui alimente le four et règle le tirage (LE NY, 1988, p. 23). Cet espace est de plan rectangulaire et mesure environ 6,50 m de longueur pour 5 m de largeur. Ses parois ouest et est étant presque verticales, les tuiliers devaient y accéder par le côté sud. Ce dernier côté présente une pente nord-sud en direction du four. En effet, la profondeur maximale de cette aire de travail se situe au niveau du sol décapé devant l’entrée du foyer où elle atteint 1,50 m, alors qu’elle ne mesure que 1,10 m à mi-pente (soit 2 m en retrait du four). Une coupe, effectuée dans la partie sud de l’excavation, n’a pu mettre en évidence la nature de l’accès, qu’il s’agisse d’une simple rampe ou d’un escalier. Quant au côté nord, il est matérialisé par deux massifs maçonnés de part et d’autre de la gueule du four (ig. 3). Une coupe transversale est-ouest a permis de comprendre les trois phases du comblement de l’aire de service. La première sédimentation est liée à la période d’occupation, la seconde à celle de démolition du four et la dernière à celle du scellement déinitif de l’aire (ig. 4A). 2.3. Foyer 2.3.1. Généralités Le foyer se compose des parties conservées suivantes : la gueule, l’alandier et la chambre de chauffe. De plus, un couloir central voûté en tas de charge à ressauts, large d’un mètre en partie basse, parcourt toute la longueur du four sur près de 7 m. Les parties en élévation, la sole et le laboratoire, qui étaient situées au-dessus de la chambre de chauffe, ont disparu (ig. 3). Les matériaux utilisés pour la construction d’un four sont majoritairement des fragments de tegulae, plus rarement des fragments de briques. Les terres cuites architecturales ont des propriétés isolantes pour conserver la chaleur et réfractaires pour la supporter. Si nous nous référons à la typologie des fours de tuiliers italiens établie par N. Cuomo di Caprio2, il apparaît que le four de tuilier de Hombourg-Budange est de type IIE, c’est-à-dire avec une sole assez grande, supportée par des murets de soutènement reliés entre eux par des arcs de voûtes qui préservent un couloir central pour la chauffe ; des conduits de chaleur installés entre ces murets répartissent latéralement les gaz chauds sous la sole. D’après les données statistiques de Françoise Le Ny, les fours de type IIE constituent près des deux tiers des fours recensés, c’est-à-dire les plus fréquemment rencontrés (LE NY, 1988, p. 45). En sachant que le bon fonctionnement d’un four est fortement lié à la régularité de la circulation intérieure de l’air chaud, on peut penser que le vent et les différents climats constituaient des facteurs importants. Aussi l’orientation des fours a-t-elle pu jouer un rôle déterminant pour leur fonctionnement dans des régions où souflent des vents dominants et réguliers. Le four de Hombourg-Budange présente une gueule orientée au sud mais que la profondeur de l’aire de service protégeait des courants d’air trop forts, protection renforcée par la halle qui entourait le four. En revanche, il est possible que cette orientation ait renforcé le mouvement ascendant des gaz chauds à la sortie du laboratoire, éloignant du chauffeur les retours de fumées. 2. CUOMO di CAPRIO, 1972. L’auteur distingue deux grands types de fours de l’Italie romaine : les fours circulaires et les fours rectangulaires. Les fours circulaires présentent cinq plans différents (types IA, IB, IC, ID, IE), les fours rectangulaires quatre plans différents (types IIA, IIB, IIE, IIF). L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 393 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Niveaux d’occupation 1 - Limon argileux gris noir, nombreux petits charbons de bois 2 - Limon argileux orange panaché de gris, nombreux nodules de terre cuite 3 - Limon argileux gris panaché d’orange, nombreux nodules de terre cuite Démolition du four 4 - Limon argileux brun-gris, englobant de nombreux éléments de terre cuite architecturale (parois de four...), moellons calcaires et grès jaune Scellement 5 - Limon argileux brun, englobant des éléments de terre cuite architecturale, des moellons, de la faune, des charbons de bois Terrain naturel (argile verte) A : comblement de l’aire de service Ouest 5 96 m NGF B : accès (?) à l’aire de service 97 96,08 m NGF 1 2 3 Ouest 1 1 2 2 3 126 3 4 2 1 Limites de fouille Est Est 127 97 - Limon argileux brun-gris, nombreux nodules de terre cuite 126 (1) - Limon argileux brun-gris, nombreux fragments de terre cuite architecturale (TCA) de petite taille, fragments de tuiles de grosse taille 126 (2) - Limon argileux brun-vert, quelques fragments de TCA 126 (3) - Limon argileux vert, fragments de tuiles = environ substrat 127 (1) - Limon argileux brun-gris foncé, nombreux charbons de bois de petite taille, petits fragments de TCA 127 (2) - Limon argileux brun-vert, quelques nodules de TCA 86 (1) - Limon argileux brun-gris, nombreux nodules de terre cuite, quelques charbons de bois 86 (2) - Limon argileux brun-vert, quelques fragments de TCA 86 C : façade d’entrée du four Est Ouest voûte effondrée 97 m Maçonnerie dégagée en terre cuite architecturale (TCA) Démolition composée de TCA mur (24 assises) gueule mur non dégagé 96 m NGF Substrat (argile verte) rubéfié Substrat (argile verte) 95 m drain ? Limites de fouille D : entrée du four (côté alandier) imbrices imbriquées Est Ouest Empilement d’imbrices devant l’entrée du four voûte effondrée 97 m mur ressaut 0 96 m NGF mur non dégagé 2m 95 m drain ? E : profil de la chambre de chauffe Ouest Est 99 m B laboratoire A C E 98 m carneaux sole chambre chauffe 97 m NGF 96 m D 0 10 m 95 m Fig. 4. Coupes transversales du four. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. 394 L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) 2.3.2. Gueule du four La façade de l’alandier est matérialisée par un mur maçonné dans lequel s’ouvre la gueule du four et s’appuie de part et d’autre de la fosse du four et de son aire de service, creusée dans le substrat naturel. Elle est conservée sur vingt-quatre assises (hauteur conservée de plus de 1 m) composées essentiellement de fragments de tegulae liés avec de l’argile verte compacte, l’arrière de l’élévation se composant d’un ressaut de fondation en partie basse qui supporte des assises moins larges (ig. 4 C et D). La gueule, ouverture vo tée, est aménagée au centre de cette façade. Il s’agit de l’ouverture basse de l’alandier, dans laquelle le chauffeur démarre le feu. Elle présente une hauteur sous l’intrados d’au moins 1,20 m pour une largeur maximale de 1 m. Un empilement d’imbrices mal cuites a été retrouvé en place devant la gueule. Elles avaient pour fonction de venir colmater l’entrée du four pour réguler le tirage, voire maintenir la température, à l’intérieur du four lors de la « pleine cuisson », palier de transformation des terres cuites architecturales (ig. 15). 2.3.3. Alandier L’alandier canalise le lux de chaleur dégagé par le feu, de la gueule à la chambre de chauffe (ig. 3, 16 et 17). Il éloigne le feu du chargement à cuire qu’il protège des irrégularités de lammes et de chaleur. Ce conduit vo té présente les dimensions internes suivantes : une longueur de 3 m sur 1 m de largeur pour une hauteur interne de 1,35 m. Au moment de la fouille, il était comblé par des éléments de démolition provenant de l’élévation du four. De part et d’autre de l’alandier et à l’arrière du mur de façade, des massifs latéraux composés de pierres de grès jaune, de fragments de tuiles et de terre argileuse, ont été aménagés. Leur fonction est double : ils permettent de contrebuter l’alandier et de renforcer son isothermie. 2.3.4. Chambre de chauffe La chambre de chauffe correspond à la partie inférieure du four où débouchent les lammes et la chaleur à la sortie de l’alandier (ig. 3). De plan rectangulaire, elle présente les dimensions internes suivantes : longueur de 3,70 m pour une largeur conservée de 2,75 m. Elle se compose de quatorze murets de soutènement disposés sur des banquettes disposées de part et d’autre du couloir central voûté. Ces murets, larges d’environ 0,30 m et fondés sur au moins 1 m, sont destinés à supporter la sole quand la portée de cette dernière est trop importante. Ils sont reliés entre eux par des arcs de voûte qui délimitent le couloir central de chauffe. Entre les murets se trouvent les conduits latéraux de circulation des gaz chauds, aménagés à la surface des banquettes. Ils sont larges de 0,20 m et inclinés de 25° vers le couloir central de chauffe et distribuent la chaleur vers la périphérie du four pour que celle-ci soit répartie de manière plus homogène sous la sole. Le fond de l’extrémité supérieure des conduits est formé de deux à trois imbrices posées à l’endroit (sur leurs bords) et se chevauchant légèrement (ig. 4E et 18). Du fait de la chaleur intense, les terres cuites composant la maçonnerie de la chambre de chauffe sont vitriiées et présentent une couleur caractéristique bleuâtre. 2.3.5. Sole La sole du four de Hombourg-Budange n’est plus visible (ig. 3). uelle que soit la nature de cette plateforme de chargement, elle s’appuyait sur les murets de soutènement de la chambre de chauffe et devait présenter des oriices ou « carneaux » qui permettaient la circulation des lammes et des gaz chauds de la chambre de chauffe (foyer) vers la chambre de cuisson (laboratoire). Cette sole a pu être constituée d’argile, de tegulae ou d’imbrices, disposées à plat ou debout mais préservant des carneaux entre elles (peut-être un mélange des dif différents éléments). 2.3.6. Laboratoire Le laboratoire correspond à la partie haute du four dans laquelle est disposée la charge à cuire : tuiles, briques ou autres matériaux de construction. Celui du four de Hombourg-Budange n’est pas conservé (ig. 3). Toutefois, ses dimensions en plan sont connues car le laboratoire est le prolongement en élévation de la chambre de chauffe dont nous connaissons les dimensions internes citées précédemment (3,70 m de longueur sur 2,75 m de largeur). L’élévation du laboratoire ayant totalement disparu, il n’est pas possible de savoir si nous sommes en présence d’un laboratoire maçonné permanent ou d’un laboratoire non permanent détruit après chaque cuisson. Le seul indice qui pourrait laisser penser que nous sommes en présence d’un laboratoire maçonné permanent est que la chambre de chauffe conserve les vestiges de sortes de contreforts appuyés contre ses murs latéraux est et ouest. Ces éléments consistent en des excroissances de fragments de tuiles, longues de 1,10 m à 1,30 m et larges de 0,60 m. Une coupe effectuée dans l’un d’eux révèle un creusement aux parois verticales, profond de 0,45 m et comblé par des fragments de tegulae disposés pêle-mêle. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 395 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Leur fonction était certainement de soutenir les murs parementés du laboratoire. De même, nous ne savons pas de quelle nature était la couverture du laboratoire. Les laboratoires des ateliers traditionnels qui utilisent encore ce type de four, ou des fours apparentés, ne possèdent pas de couverture. En effet, lors de la montée en température, la vapeur dégagé par le chargement de terres cuites architecturales qui perd son eau de malaxage (« étuvage »), représente une énergie susceptible d’altérer une voûte permanente. Un lit de tuiles déjà cuites, peu épais et disposé de façon à laisser circuler ce qui sort du laboratoire (vapeur, lammes, gaz), peut éventuellement protéger le haut de la charge non cuite mais généralement une toiture de protection, sufisamment haute pour ne pas br ler, sufit (LE NY, 1992). 2.4. Protection du four et aménagement périphérique Une série de trous de poteau localisés sur le pourtour immédiat du four permet de restituer un aménagement qui enceint et protège l’ensemble de la structure artisanale. 2.4.1. Couverture du laboratoire Quatre imposants poteaux forment, autour du laboratoire, un ensemble quadrangulaire de 7 m de côté. De forme circulaire ou oblongue, leur longueur oscille entre 2,10 m et 2,50 m et leur largeur entre 1,60 et 1,90 m. L’observation en coupe montre des poteaux profonds de 0,75 à 0,90 m et deux états de construction successifs (ig. 3). Ce dispositif correspond à un abri en matériaux légers, destiné à protéger le laboratoire des intempéries. Son architecture consistait en une charpente de bois inclinée et soutenue par quatre gros poteaux porteurs, la charpente étant certainement recouverte de tuiles destinées à empêcher l’eau de pluie de pénétrer par le haut du laboratoire. 2.4.2. Halle de plan centré 3 Un alignement de poteaux, orienté nord-sud et parallèle au four de tuilier, se situe à environ 6 m à l’est de celui-ci (ig. 2B). Il se compose de neuf poteaux dont deux corniers aux dimensions plus importantes que les autres (1 m de côté, 0,55 m et 0,30 m de profondeur). Les poteaux intermédiaires offrent un plan quadrangulaire de 0,50 m de côté en moyenne, pour une profondeur 3. La dénomination des halles qui est utilisée dans le texte : « halle de plan centré » ou « halle-galerie » et « halle de plan allongé » est issue de la thèse de F. Charlier (2011). 396 oscillant entre 0,15 m à 0,30 m. Au sud du four, trois poteaux forment un retour perpendiculaire à l’alignement des neuf poteaux décrits précédemment. L’érosion n’a pas permis d’observer de retour septentrional au niveau du poteau cornier nord-est. L’effet de pente naturelle du terrain associé au décapage archéologique explique ce phénomène érosif. Ce dispositif correspond à une halle de plan centré consistant en un aménagement périphérique servant notamment au stockage des matériaux à cuire ou sortis du laboratoire. En construisant une structure autour du four, les artisans cherchaient sans doute à renforcer sa protection. Dans le cas qui nous concerne, le côté est du bâtiment a été observé entièrement, les côtés nord et sud sont partiellement visibles, et la partie occidentale est située hors emprise. De ce fait, seule la longueur de la halle est connue avec certitude (19 m). Pour la largeur, si l’on considère que l’aménagement est symétrique par rapport au four, cette dernière serait de 18 m. Cette halle et la structure couvrant le laboratoire forment un même ensemble bâti autour du four mais la charpente recouvrant le four devait dépasser de celle de la halle de plan centré, de façon à laisser l’air circuler entre les deux. Dans ce cas, les quatre poteaux disposés autour du laboratoire servaient de supports porteurs internes. 2.4.3. Drainage Orienté globalement nord-sud, parallèlement au four de tuilier, un drain, long de 12 m et large de 0,50 m, est situé à 1,50 m à l’est du four (ig. 2B). Profond de 1 m à 1,20 m, ses parois sont verticales et son remplissage se compose de trois couches successives : un niveau de blocs calcaires sur le fond, suivi d’une couche d’argile dont la nature et la couleur sont proches de celles du substrat, enin une couche de limon argileux rose. D’après la topographie du terrain accusant une pente orientée NE-SO, ce drain servait de barrage aux eaux de ruissellement, évitant ainsi l’inondation du four. Un autre fossé drainant, orienté SO-NE, est localisé dans la moitié ouest de l’aire de service et se poursuit au-delà des limites de cette dernière. Orienté en direction de la gueule du foyer et respectant le sens de la pente, il servait probablement à évacuer les eaux d’iniltration ou de ruissellement contenues dans le four. Plusieurs fours fouillés possèdent un drain creusé dans le sol du couloir central ain de recueillir les eaux d’iniltration et de ruissellement dues pour les unes à l’encavement de la chambre de chauffe, pour les autres aux intempéries durant la période de non-activité. Le four est ainsi protégé des dégradations naturelles. Aucun des trois L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) sondages effectués dans le four de Hombourg-Budange n’est descendu sufisamment en profondeur pour mettre en évidence ou non ce type d’aménagement. 3. LES AMÉNAGEMENTS ANNEXES (S.J.) 3.1. Halle de plan allongé Un bâtiment sur poteaux se situe 8 m à l’est du four de tuilier (ig. 2B). Connu seulement par trois de ses quatre angles (l’angle sud-est se situant en dehors du décapage archéologique), l’édiice mesure 17 m de longueur par 11 m de largeur. Les poteaux sont très arasés et certains ne sont plus visibles du fait de l’érosion naturelle du terrain. Ceux de la paroi orientale sont les mieux conservés. De section quadrangulaire et aux angles arrondis, ces derniers ont un plan de 0,60 m sur 0,60 m à 0,90 m, pour une profondeur conservée de 0,15 m à 0,20 m. Les dimensions importantes du bâtiment, son orientation nord-sud et sa proximité avec le four de tuilier laissent penser qu’il s’agirait d’une halle de séchage pour les matériaux avant leur cuisson. Large de 11 m, l’édiice était certainement à deux ou trois nefs, avec un entraxe entre les poteaux de 5,50 m (deux nefs) ou d’un peu moins de 4 m (trois nefs). Toutefois, une seule nef avec charpente à ferme triangulée est également envisageable. La technique de construction du bâtiment reste mal comprise. En effet, seuls les poteaux de l’armature externe s’apparentant à des poteaux plantés sont encore en partie visibles. En revanche, la partition interne du bâtiment a totalement disparu. L’hypothèse d’un édiice à soubassements mixtes combinant poteaux plantés sur l’armature extérieure et poteaux posés en matériaux de terre cuite en partition interne, est probable. 3.2. Bâtiment à quatre poteaux À 35 m au nord-est du four de tuilier et à moins de 10 m au nord-est de la halle de plan allongé, un bâtiment quadrangulaire à quatre gros supports, long de 8 m et large de 5 m, a été mis en évidence (ig. 2B et 5). Les poteaux, de plan quadrangulaire, ont une longueur de 1,10 m à 1,20 m, une largeur de 0,85 m à 0,90 m et une profondeur oscillant entre 0,60 m et 1 m. La présence de nombreux poteaux dans l’environnement du bâtiment atteste plusieurs états de construction de l’édiice. Sa fonction reste inconnue : artisanat de l’argile, habitat, agriculture ? D’après la combinaison des datations céramique et radiocarbone, la chronologie du bâtiment se situe dans une fourchette comprise entre la seconde moitié du Ier siècle et le premier tiers du IIe siècle ap. J.-C. 3.3. Puits Un puits, situé entre la halle de plan allongé et le bâtiment rectangulaire à quatre poteaux, offre un plan circulaire d’un diamètre intérieur de 1,20 m et d’un diamètre extérieur de 1,80 m (ig. 2B et 5). Maçonné en pierres calcaires de taille moyenne et fragments de grès jaune de petite taille, il a été observé en coupe sur une profondeur de 2 m, le fond n’ayant pas été atteint pour des raisons de sécurité. Deux types de comblements sont à distinguer. De la surface de décapage à environ 0,80 m de profondeur, le remplissage se compose de limon argileux brun, avec de nombreux fragments de tuiles gallo-romaines et quelques fragments de céramique gallo-romaine (sigillée, ine et commune). En deçà de 0,80 m, le remplissage devient organique avec présence de bois de chêne n’ayant pas fourni suffisamment de cernes pour obtenir une datation dendrochronologique. Ce puits est une composante essentielle à l’artisanat de l’argile, l’eau étant indispensable à la fabrication d’éléments en terre cuite architecturale. Séparés d’un peu plus de 2 m de distance, il est tentant d’associer un poteau au puits (ig. 2B) et de faire de ce dernier un puits à balancier. Si ce type d’aménagement est bien connu dans le monde oriental antique, ainsi qu’en Afrique du Nord dans l’Antiquité romaine, il n’existe pas à notre connaissance d’attestation en Gaule romaine. Une autre hypothèse concernant ce poteau est qu’il ferait partie d’une installation temporaire de type « chèvre » et suspension de poulie liée au creusement du puits (extraction des matériaux). Faute de littérature comparative sufisante sur les puits, ces deux possibilités ne sont que des hypothèses de travail. Malheureusement, les puits sont la plupart du temps considérés comme des aménagements secondaires et ne font donc pas l’objet d’attention particulière (mode de creusement, techniques de construction…). 4. MOBILIER ARCHÉOLOGIQUE 4.1. Poterie (d’après R. Prouteau, Inrap) Une cinquantaine de tessons gallo-romains a été découverte sur l’ensemble du site, l’écrasante majorité provenant du colmatage de structures profondes. La moitié vient du puits : céramique ine (quatre), céramique rugueuse (deux), céramique sigillée (onze), terra nigra (deux). L’absence d’éléments remarquables (fond, bord, décors), la taille modeste et la mauvaise conservation de la terre cuite n’autorisent aucune datation précise. L’autre moitié a été exhumée du comblement de poteaux. Parmi les éléments datants, on remarque seulement un bord L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 397 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE GF 98 N GF 1 - Limon argileux brun, nombreux fragments de tuiles gallo-romaines 2 - Limon argileux gris foncé, nombreux fragments de tuiles gallo-romaines, blocs calcaires provenant de l'effondrement du parement, céramique antique 3 - Parement du puits composé de blocs calcaires 107 - Cheval de trait inhumé (XIXe-XXe siècles) : limon argileux gris-brun 41 - Fossé parcellaire postérieur aux autres structures : limon argileux brun-rose 30 NG F 97 N 121 35 99 23 Puits 40 33 Puits 40 41 Cheval 107 0 98 m 20 m 107 1 poteau (associé au puits ?) 97 m NGF 3 2 3 Substrat : Argile verte 30 96 m 23 22 2 2 1 35 3 1 2 5 95 m 2 2 1 5 0 2 2m 1 34 121 4 1 - Négatif de poteau : Limon argileux brun-gris foncé, charbons de bois, nodules de terre cuite 2 - Fosse d’implantation de poteau : Limon argileux brun-gris à brun-rose 3 - Limon argileux gris-vert 4 - Limon argileux brun-gris avec litages horizontaux 5 - Limon argileux gris-orange (proche du substrat) 6 - Limon argileux brun 33 2 1 2 Fig. 5. Plans et coupes du puits et des poteaux du bâtiment à quatre poteaux. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. de terra nigra (inv. 121-20-128) attribuable au Ie siècle ap. J.-C., et un bord de céramique ine (inv. 49-20-137) dont la datation reste incertaine (gallo-romain ? Ve-VIe siècles ?) (ig. 6). 4.1. Productions du four (J.-D. L.) Faute de temps, peu de terres cuites architecturales ont pu être collectées, seuls quelques matériaux issus du four ont pu être récupérés. L’étude ne concerne donc qu’une quinzaine d’échantillons prélevés autour du four et dans ses maçonneries. Il semble que cet atelier produise des tuiles de toiture (tegulae, imbrices et tuiles faîtières) (ig. 7). Deux tuiles plates de type tegula et une dizaine de tuiles canal de type imbrex ont pu être observées et mesurées. L’échantillonnage montre une faible variabilité des dimensions des individus. Les tegulae ont une longueur de 42 cm et une largeur de 32-33 cm avec une épaisseur variable de 1,75-2 cm à 3-3,5 cm d’un exemplaire à l’autre. Les imbrices ont une longueur de 398 30 à 33 cm (le plus souvent 31 cm) et une largeur de 16-17 cm. Une seule imbrex diffère du reste du lot des tuiles canal avec une dimension particulière de 28 cm sur 18, elle correspond en fait à une tuile faîtière plus courte et plus large de format rectangulaire, identique à un modèle trouvé sur la fouille de la villa de Liéhon (LAFFITE et alii, 2005). Les imbrices découvertes ici ont la caractéristique d’avoir un canal bien arrondi alors que régionalement le creux du canal a un proil plut t triangulaire. Ces dimensions correspondent à une standardisation des modèles couramment rencontrés sur les sites gallo-romains fouillés en Lorraine4. Ainsi les tegulae du site sont attribuables au modèle médian régional répertorié, 4. Un échantillon d’une centaine d’individus de tuiles des deux types (imbrices et tegulae) a été répertorié sur les sites fouillés par l’Inrap et dans les réserves du Musée de Metz, ce qui a permis d’établir un classement des différents modèles en trois modules : par exemple pour les tegulae, cat. 1 : 35-39,5 / 29,5-32 ; cat. 2 : 40-42 / 32-34 ; cat. 3 : 43,5-46 / 35-37,5, avec des modèles exceptionnellement grands ou petits (étude en cours « TIR Lorraine - Tegulae Imbrices Régionales Lorraine » - J.-D. Lafite, Inrap). L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) 42-20-121 : Amphore 49-20-137 : Gallo-romain ? 121-20-128 : Terra nigra (Ier siècle) 77-20-132 : Gallo-romain ? 0 5 cm Fig. 6. Céramique antique. Auteur : R. Prouteau, Inrap. plaque striée (râté de cuisson) imbrex Bertrange-Immeldange, Faulquemont, Amnéville, Liéhon et Metz-Sablon. À la production de tuiles s’ajoute une fabrication de briques pariétales. Il s’agit de briques de format rectangulaire de faible épaisseur, dont une des faces présente une préparation pour mortier faite de deux rangées d’ondulations réalisées au peigne (utilisation murale dans les thermes et les salles à hypocauste). L’individu recueilli est entier, mais il correspond à un raté de production car la brique est déformée (courbure). Ses dimensions sont de 34 cm de longueur sur 24 cm de largeur (environ 18 digiti sur 13) et 3 cm d’épaisseur. Rectangulaire et sans rebords, cette brique est plus petite qu’une tegula. La production mixte de matériaux de construction pour les toitures, les thermes et les salles à hypocauste est souvent constatée dans les ateliers céramiques gallo-romains, alors que la production de véritables briques de type later est beaucoup moins répandue en Gaule. 5. DATATIONS ARCHÉOMÉTRIQUES 5.1. Archéomagnétisme tegula tuile faîtière 0 20 cm Fig. 7. Terres cuites architecturales prélevées dans la maçonnerie et dans l’environnement du four de tuilier. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. qui présente une longueur de 40 à 42 cm pour 32 à 34 cm en largeur, soit un rapport moyen de 41/33 cm (soit 22 digiti sur 18 digiti). Les imbrices du site quant à elles, appartiennent à un modèle de petite taille, d’une longueur de 30 à 33 cm pour 15 à 16 cm de largeur, soit un rapport moyen de 32/15,5 cm (soit 17-18 digiti sur 8-9 digiti ; digitus : doigt romain de 1,848 cm : 1/16 du pes, le pied romain). Ces dimensions d’imbrices et de tegulae ont également été retrouvées sur des modèles entiers échantillonnés sur des sites de villae rurales et urbaines aux environs de Metz, comme à Corny, Peltre, Moncheux, Plusieurs prélèvements archéomagnétiques5 ont été effectués sur le pourtour de la chambre de chauffe, constitué de sédiment en place rubéfié. La datation archéomagnétique à 95 % nous donne deux intervalles d’âges possibles qui sont 45-190 AD et 200-470 AD. À l’intérieur de ces intervalles, les périodes les plus probables sont respectivement 115-155 AD et 275-295 AD (pics 50 centrés sur 135 et 285 AD). 5.2. Radiocarbone (S.J. et J.W.) Deux datations 14C ont été réalisées en 2007 par le Centrum voor Isotopen Onderzoek de Groningen (PaysBas). La première, dont le but était de la confronter aux résultats archéomagnétiques, concerne un charbon de bois prélevé à l’entrée de l’alandier (GrA-35619 : 2550 ± 40 BP ; calibration effectuée avec Calib rev 6.0.0.). Mais un problème dans la datation de ce charbon ne permet aucune confrontation. En effet, la datation du fragment se situe dans une fourchette comprise entre 805 et 540 BC (Hallstatt), avec une probabilité de 95,4 %. Ce résultat ne correspond absolument pas à nos attentes puisque nous attendions une datation concordante avec la période gallo-romaine. Le prélèvement analysé a éventuellement été contaminé par le calcaire ancien du sous-sol géologique. 5. D’après N. Warmé, Inrap ; étude effectuée au laboratoire de Paléomagnétisme du Parc Saint-Maur – Institut de Physique du Globe de Paris. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 399 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Afin de dater le bâtiment à quatre poteaux, une seconde datation a été effectuée sur un charbon contenu dans le négatif d’un poteau (st. 33). La datation du fragment (GrA-35462 : 1970 ± 35 BP) se situe dans une fourchette comprise entre 45 BC et 121 AD, avec une probabilité de 95,4 %. Du fait de l’absence de matériel archéologique significatif, une troisième datation radiocarbone concerne un noyau d’aubépine à un style Crataegus monogyna prélevé dans le puits à 1,80 m de profondeur. La date non calibrée de 1695 ± 25 BP (KIA-38799) donne, après calibration avec Calib rev 6.0.0., une fourchette de 2 sigma de 258 – 412 AD, qui indique une période chronologique de la deuxième moitié du III e siècle jusqu’au début du V e siècle ap. J.-C. pour le comblement du puits. Dans la fourchette de 2 sigma, la plus grande probabilité (74,4 %) se situe entre 318 et 412 AD. Cette datation a été réalisée en 2009 par le Leibniz-Labor für Isotopenforschung und Altersbestimmung de l’Université de Kiel (Allemagne). On ne peut pas exclure que le puits soit resté encore ouvert et en fonction après l’abandon de l’atelier de tuilier et qu’il ait été comblé plus tard. 6. ARCHÉOBOTANIQUE (J.W.) 6.1. Étude carpologique du puits Trois prélèvements provenant du remplissage du puits ont été étudiés d’un point de vue carpologique. Ils ont été traités par tamisage total sous l’eau avec des tamis de 0,315, 0,5 et 1 mm. Le prélèvement le plus profond, effectué à 1,80 m, a révélé une grande quantité des macrorestes végétaux imbibés, grâce à la proximité de la nappe phréatique. Il a fourni au total 794 macrorestes exclusivement non carbonisés et non minéralisés. Les déterminations et les décomptes en nombre minimum d’individus igurent dans le tableau ig. 8. La taxinomie se conforme à la lore de la Belgique et du nord de la France de LAMBINON et alii, 2004. Les taxons de fruits sauvages et de plantes de cueillette sont les plus représentés dans l’assemblage végétal. L’absence de restes de plantes cultivées prouve la vocation essentiellement artisanale du puits. Pour comparaison, les puits découverts en contexte d’établissements agricoles fournissent généralement des spectres carpologiques riches en plantes cultivées (WIETHOLD, 2010). La forte abondance de fruits sauvages dans le comblement du puits peut s’expliquer par un lessivage du terrain autour de celui-ci au moment de son abandon, le ramassage de débris végétaux (branches, brindilles, fruits, noyaux…) et minéraux (pierres, tuiles…) associés à de la terre servant au colmatage de la structure. 400 82,4 % de ces restes sont des noyaux d’aubépine à un style Crataegus monogyna. On peut estimer que le petit arbre épineux poussait à proximité du puits, mais probablement pas directement à côté. En effet, pour assurer la bonne qualité de l’eau, il fallait éviter que de la matière végétale ne tombe fréquemment dans le puits. L’aubépine n’est pas une plante de cueillette importante et ses utilisations sont limitées à quelques propriétés médicinales. Comme dans la couche supérieure, les noyaux de deux espèces de sureau, le sureau yèble, Sambucus ebulus, et le sureau noir, Sambucus nigra, sont également fréquents et occupent les deuxième et troisième rangs d’abondance. Contrairement aux fruits du sureau noir, les fruits de la yèble ne sont pas comestibles, mais peuvent être utilisés comme le sureau noir pour la teinture de textiles. On compte également quelques noyaux de prunellier Prunus spinosa, plante de cueillette et de teinturerie, les akènes de mûre Rubus fruticosus agg., trois noyaux de cornouiller sanguin Cornus sanguineus et les akènes d’églantier commun Rosa cf. canina. L’ensemble de ces taxons peut provenir d’une haie de plantes épineuses qui a probablement délimité la tuilerie antique. Les autres plantes sauvages mises en évidence sont principalement des espèces de zones rudérales et bien anthropisées, comme la grande ciguë Conium maculatum, le cirse commun Cirsium cf. arvensis et la grande bardane Arctium cf. lappa. Le seul reste d’une plante de zone humide est un akène de renoncule rampante Ranunculus repens. 6.2. Étude anthracologique 6.2.1. Détermination et interprétation des combustibles utilisés dans le four Pour déterminer la nature des combustibles utilisés dans le four, trois prélèvements ont été effectués dans des couches cendreuses et charbonneuses (ig. 9). La couche charbonneuse, située en partie basse de l’aire de service, à proximité immédiate de la gueule du four, contenait 66 % de pin sylvestre (Pinus cf. sylvestris), 17 % de hêtre ( agus sylvatica), 15 % de chêne ( uercus sp.) et 2 % d’aulne glutineux (Alnus cf. glutinosa). Les charbons de bois prélevés dans l’alandier sont exclusivement des charbons de chêne à feuilles caduques ( uercus sp.). Le prélèvement effectué dans la chambre de chauffe s’est révélé infructueux car il ne contenait que des cendres. Le chêne et le hêtre sont les arbres les plus communs et les plus fréquents de la région. Leurs hautes valeurs énergétiques et leurs conditions favorables de combustion permettent une utilisation dans des processus techniques. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) Couche / type de structure No. structure Profondeur de prélèvement en mètre Volume / litres (bruts) puits 40 1,40 6,0 puits 40 1,60 8,0 total puits 40 1,80 10,0 NMI 24,0 C. IIIe-Ve s. ap. J.-C. C. IIIe-Ve s. ap. J.-C. Datation IIIe-Ve s. ap. J.-C. Noms scientifiques d'après LAMBINON et alii alii, 2004 Fruits cultivés et sauvages Sambucus nigra Sureau noir 13 61 48 Sambucus ebulus Yèble 15 41 33 Crataegus monogyna Aubépine à un style 555 654 Prunus spinosa, noyaux Prunellier 11 17 Rubus fruticosus agg., akénes Ronce/mûr 5 11 Cornus sanguinea Cornouiller sanguin 5 3 Rosa cf. canina Rosier des chiens/Églantier commun 1 3 Corylus avellana, noisettes Noisetier 4 Rubus caesius Ronce bleue 2 Fragaria vesca Fraisier sauvage 1 Messicoles et autre végétation synanthrope, carbonisés Cirsium cf. vulgare Cirse commune 1 5 Carex muricata s.l. Laîche de Paira/Laîche en épi 1 3 Conium maculatum Grande ciguë 6 Cirsium arvense Cirse des champs 3 Arctium cf. lappa Grande bardane 3 Galeopsis bifida/tetrahit Galéopsis bifide/tétrahit 1 Agrimonia eupatoria Aigremoine eupatoire 1 Lapsana communis Lampsane 1 Polygonum lapathifolium agg, Renouée à feuilles de Patience 1 Sonchus asper Laiteron épineux 1 Urtica dioica Grande ortie 1 Plantes des zones humides Ranunculus cf. repens Renoncule rampante 2 1 Autres Indeterminata, bourgeons Indéterminés 1 Indeterminata, diaphragma, Indéterminés 3 non carbonisés Total 28 692 798 122 89 1209 28 16 8 4 4 2 1 6 4 6 3 3 1 1 1 1 1 1 3 1 3 1518 Fig. 8. Macro-restes végétaux provenant du remplissage du puits 40. Décomptes en nombre minimum d’individus (NMI). Déterminations : J. iethold, Inrap. Bât. Bât. No. structure Ensemble 23 33 74 Structure T.P. T.P. alandier Volume/litres (bruts) Datation Quercus spec. Fagus sylvatica Alnus cf. glutinosa Acer cf. campestre Pinus cf. sylvestris Total 10,0 G.R. 29 71 10,0 G.R. 50 49 5,0 Chêne Hêtre Aulne noir Érable champêtre Pin sylvestre Four total aire de service 10,0 100 35 G.R. 100 15 17 2 1 100 NMI 100 66 100 194 137 2 1 66 400 Rappel des abréviations : Bât. (bâtiment), cf. (confer, onfer détermination incertaine), T.P. (poteau), G. R. = époque gallo-romaine Fig. 9. Charbons de bois provenant du four de tuilier. Déterminations : J. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 iethold, Inrap. 401 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Zone D 0 5m ? ? Zone A Zone B Zone C négatif de poteau structure antique structure non datée ? structure découverte en diagnostic et non réapparue en fouille Fig. 10. Plan général du site gallo-romain et délimitation des quatre zones d’étude. Auteur : . Charlier, Archeodunum, à partir du plan général de la fouille. L’exclusivité du chêne dans le conduit de chauffe du four de Hombourg-Budange témoigne d’une sélection intentionnelle d’une essence dure, pour garantir une combustion stable à température élevée et produisant peu de lammes. Il s’agit, de plus, de bois de tronc et non de racines ou de branches. Ceci correspond bien à la consommation d’un atelier d’artisanat. En revanche, l’aire de service a fourni, au niveau de l’entrée du four, une majorité de charbons de pin Pinus cf. sylvestris. Le bois du pin sylvestre brûle plus rapidement et produit des lammes longues à cause de la résine qu’il contient. D’un point de vue paléo-écologique, le pin sylvestre semble provenir des régions des grès luxembourgeois, des quelques falaises rocheuses des côtes de la Moselle ou encore du massif vosgien. Cela témoigne d’une gestion organisée des ressources en combustibles. Néanmoins, ces résultats anthracologiques ne proviennent pas d’un échantillonnage très exhaustif et nécessitent donc quelques remarques supplémentaires et méthodologiques. L’exclusivité du chêne dans l’alandier ne signiie pas obligatoirement une mono-spéciicité de ce bois dans la combustion. Les matériaux à ignition vive ont été énormément utilisés dans les ateliers mais ne laissent que des cendres la plupart du temps non 402 identifiables. Dans beaucoup d’ateliers traditionnels, les bûches de bois durs servent à la montée en température alors que les fagots de bois tendre serviront à la pleine cuisson pour fournir des lammes qui traversent la chambre de cuisson (LE NY, 1992). Un bois brûle d’autant plus rapidement que sa section est faible (branches). Il y a, en effet, un rapport important entre la surface offerte à la carbonisation et l’essence car l’effet calorique recherché n’est pas le même à la montée qu’à la pleine cuisson. Généralement, les espèces tendres sont recherchées pour fournir une lamme longue lors du palier de cuisson avec le but du maintien de la température. Dans les ateliers traditionnels, on voit, lors de la pleine cuisson dans les fours verticaux, les lammes sortir du laboratoire (F. Le Ny- ray, communication écrite). 6.2.2. Étude anthracologique du bâtiment à quatre poteaux Présentant des charbons de bois dans le comblement de leur négatif, deux poteaux ont fait l’objet de prélèvement (st. 23 et 33). Les nombreux charbons de bois contenus dans le négatif de poteau 23 sont à 71 % L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) des charbons de hêtre ( agus sylvatica) et à 29 % des charbons de chêne ( uercus sp.). Le négatif de poteau 33 révèle 50 % de charbons de chêne ( uercus sp.), 49 % de charbons de hêtre ( agus sylvatica) et 1 % de charbons d’érable champêtre (Acer cf. campestre) (ig. 9). 7. ANALYSE FONCTIONNELLE ET RESTITUTION ARCHITECTURALE DE LA TUILERIE (F.C.) L’emprise de la fouille n’a pas permis de mettre au jour la surface totale de la tuilerie gallo-romaine. Toutefois, l’analyse des vestiges et de leur répartition nous fait croire que non seulement la plus grande partie du site a été reconnue mais qu’il est probable que nous disposons des espaces de travail des différentes étapes de la chaîne opératoire (à l’exception de la première : l’extraction de l’argile). Quatre espaces ont été déterminés et identifiés d’ouest en est par les premières lettres de l’alphabet mais en remontant la chaîne opératoire (ig. 10) : de la cuisson des matériaux à la préparation de l’argile. Ce sens inverse à la production a été choisi ain que la présentation du site se fasse selon un ordre décroissant de sûreté dans l’interprétation des vestiges et parce que l’interprétation des deux derniers espaces se justiie essentiellement par celles des deux premiers. L’identiication des structures de Hombourg-Budange et leur restitution architecturale s’appuient sur l’étude de très nombreuses autres tuileries romaines mais aussi d’ateliers des époques moderne et contemporaine. En raison de la place qui nous est impartie, nos analyses sont extrêmement résumées, voire partielles, et la documentation portant sur des structures comparables à celles de la tuilerie de Hombourg-Budange ne peut être présentée ici6. Les quatre espaces de travail sont successivement analysés à l’aide d’une série de plans (ig. 11) et ensuite une tentative de découpage chronologique du site est proposée avec une restitution axonométrique de l’ensemble de la tuilerie (ig. 12). 7.1. Le four et une halle de plan centré Même si notre connaissance de la zone A est incomplète, la partie ouest étant hors emprise de l’opération, il est aisé d’y identiier un four entouré d’une halle de plan centré que l’on peut aussi qualiier de « halle-galerie ». Ce bâtiment servait à stocker avant cuisson les matériaux en in de séchage ou prêts à cuire. La fouille n’a pas révélé plusieurs états dans la structure du four, mais comme ses maçonneries n’ont pas été démontées, les observations n’ont été que supericielles. uelques détails de la construction et surtout l’orientation des vestiges permettent de supposer que l’ensemble a connu plusieurs états. C’est dans le dernier, l’état C, qu’aurait été élevée la halle-galerie qui entoure le four. On peut restituer à ce four un laboratoire de plan carré d’environ 3,70 m de côté intérieurement (12,5 pieds romains), c’est-à-dire de 13,66 m2 (soit un volume restituable d’environ 50,50 m3). L’orientation des côtés de la halle-galerie est identique à celle des vestiges du four dans son dernier état et à celle du drain qui longe le four du côté est, mais celle de la structure formée par les quatre poteaux qui entourent au plus près le laboratoire s’en distingue. Il est donc probable qu’ils ont été plantés dans un état antérieur. Les deux excroissances visibles sur les côtés du laboratoire, qui correspondent certainement à des fondations de contrefort, n’appartiennent pas au dernier état du four car les murs du laboratoire les auraient en grande partie recouvertes, les rendant donc inutiles. En outre, elles sont orientées de manière légèrement différente des maçonneries conservées. En respectant l’orientation de ces excroissances, on peut restituer un four antérieur, celui de l’état B, forcément plus petit que celui du dernier état C, puisque celui-ci en aurait détruit tous les vestiges à l’exception des fondations des contreforts. L’emplacement précis du laboratoire peut être déterminé en considérant que les contreforts devaient être situés en plan au milieu de ses murs latéraux. Nous obtenons ainsi un laboratoire carré 10 pieds de côté intérieurement au maximum (2,96 m), c’est-à-dire de 8,74 m2 (soit un volume restituable d’environ 25,86 m3), qui aurait été protégé par une toiture portée par les quatre poteaux conservés dans l’état suivant. La disposition du four par rapport à ces poteaux, décentrée et selon une autre orientation, nous fait croire d’une part que cette structure de cuisson a été précédée d’une autre (dans un état A), qui aurait été construite dans le même état que la toiture portée par les quatre poteaux, et d’autre part que le plan d’ensemble était parfaitement centré. 6. Une partie de cette documentation a été présentée lors de la communication au colloque. On la trouvera en totalité, ainsi que des analyses détaillées par type de structure et de nombreuses références bibliographiques, dans notre doctorat (CHARLIER, 2011). L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 403 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Zone A 85 87 drain 72 51 73 24 x 24 p. 53 four 74 125 12 x 12 p. 88 8x 8 p. 124 89 69 80 drain 132 75 aire de service 97 127 76 122 126 86 plan général 78 état A : restitution 64 x 64 p. 24 x 24 p. 24 x 24 p. 17 x 17 p. 15 x 15 p. 12,5 x 12,5 p. 10 x 10 p. état B : restitution état C : restitution Zone B 0 49 48 x 38 p. 5m 64 x 32 p. 98 Zone D 48 113 52 10 20 54 112 7 30 x 24 p. 55 119 65 ? 66 39 30 121 29 116 37 68 21 x 31 p. ? 28 118 31 36 27 x 17 p. 70 35 9 x 36 p. 32 puits 40 plan général état A : restitution 100 33 34 22 23 état B : restitution 59 plan général et restitution de trois bâtiments successifs Fig. 11. Plans des zones A, B et D et restitutions des différentes structures successives (leurs dimensions sont en pieds). Auteur : . Charlier, Archeodunum, à partir du plan général de la fouille. 404 L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) période 1 ? période 2 0 10 m période 3 5m 1m Fig. 12. ypothèses de chronologie relative et restitutions architecturales. Auteur : . Charlier, Archeodunum. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 405 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Fig. 13. Vue du four après le décapage et avant la fouille, vers le sud. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. Fig. 16. Vue en plan de l’alandier, vers l’est. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. Fig. 14. Vue du four après la fouille, vers le sud. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. Fig. 17. Vue en coupe de l’alandier, vers le sud-ouest. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. Fig. 15. Vue de la façade d’entrée du four prise depuis l’aire de service, vers le nord. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. Fig. 18. Détail de la chambre de chauffe. Auteur : S. Jeandemange, Inrap. 406 L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) Dans cette hypothèse, le four de l’état A est nécessairement plus petit encore que les suivants puisqu’aucune trace n’en a été trouvée. À titre de supposition, nous lui restituons un laboratoire carré de 8 pieds de côté intérieurement (2,37 m), c’est-à-dire de 5,60 m2 (soit un volume restituable d’environ 13,24 m3). La surface des aires de service des états A et B a été restituée dans les limites du creusement de l’aire du dernier état et l’emplacement des poteaux des toitures de ces aires déterminé en exploitant au maximum les trous de poteau découverts. Si le plan restitué du dernier état est sûr, ainsi que le fait que l’ensemble a connu un ou plusieurs états antérieurs, les plans que nous proposons des états A et B sont certes plausibles mais très hypothétiques. 7.2. Une halle de plan allongé La zone B correspond à l’emplacement d’une autre halle dont les poteaux sont très arasés, beaucoup ayant même totalement disparu. Ce bâtiment se dressait à quelques mètres du four, parallèlement à lui. Sa fonction était identique à la halle de plan centré. En exploitant la totalité des trous de poteau conservés, nous proposons de restituer deux bâtiments successifs. Dans l’état A, le corps du bâtiment aurait mesuré 48 x 38 pieds (14,19 x 11,24 m), soit une surface de 159,48 m2, et aurait comporté une galerie contre le pignon sud ; c’est ainsi que nous expliquons le léger décalage vers l’est du trou 70 par rapport à l’alignement des autres trous. En plaçant dans les trous 49, 68 et 66 des poteaux corniers, ce plan permet aussi de justiier la surface un peu plus importante de ces trous par rapport aux autres. La taille des autres trous de poteau et surtout leur entraxe permettent d’écarter l’hypothèse d’une charpente à ferme. Nous restituons donc une construction à faîtière porteuse en supposant que les poteaux de la ligne centrale devaient être placés sur des bases non fondées. À partir des poteaux conservés, nous proposons de diviser la longueur de la halle en trois travées de 16 pieds (4,73 m), divisées elles-mêmes par les poteaux latéraux en trois pour la travée centrale et en deux pour les deux autres. La division supplémentaire de la travée centrale permet d’y voir l’emplacement d’accès latéraux à la halle. L’existence d’un autre bâtiment au même emplacement est très hypothétique. La restitution que nous en proposons, l’état B, s’appuie sur l’emplacement du trou de poteau 48 (non daté) pour placer le long côté ouest et sur celui du trou 98 pour le long côté est. La localisation de ce dernier permettrait d’expliquer la forme allongée des trous 65, 66 et peut-être 49. Comme pour l’état A et sur les mêmes arguments, nous supposons que cette construction était à faîtière porteuse. Si nous dessinons le plan le plus régulier possible à partir des poteaux cités, nous obtenons une construction de 64 x 32 pieds (18,92 x 9,46 m), soit une surface de 179,07 m2. Le bâtiment pourrait être divisé en cinq travées, larges respectivement de 10, 15, 14, 15 et 10 pieds (2,96, 4,44, 4,14, 4,44 et 2,96 m). La répartition des poteaux latéraux que nous proposons permet d’ajouter, ici aussi, à la probable entrée du pignon sud, deux autres accès, exactement au milieu des longs côtés du bâtiment. 7.3. L’aire de séchage ? La zone C se trouve dans le prolongement des zones précédentes, elle est vierge de vestiges à l’exception de deux ou trois trous de poteau et d’une fosse qui attestent qu’elle faisait partie de l’atelier. Ces caractéristiques et la présence sur le côté nord d’une zone de travail probablement relative à la préparation de l’argile et au moulage des matériaux autorisent à y voir l’emplacement de l’aire de séchage. Cette aire devait être une simple surface dégagée et plane, probablement sablée, sur laquelle étaient posées les tuiles et les briques au fur et à mesure de leur moulage. 7.4. Un atelier de moulage ou « moulerie » ? La zone D concentre des vestiges divers : des trous de poteau, trois fosses et un puits. Quelques tessons protohistoriques ont été retrouvés dans les trois fosses (st. 36, 39 et 118). Cependant la localisation, le plan et le fond plat de ces fosses nous font croire qu’elles appartiennent à la tuilerie gallo-romaine où elles auraient servi à la préparation de l’argile. Leur proximité avec le puits ne peut que conforter cette interprétation. La plupart des trous de poteau ne sont pas datés. Certains ne sont peut-être pas antiques ; cette partie du site a connu en effet une occupation médiévale, un bâtiment sur solin y a été construit, occasionnant peut-être la destruction de certains vestiges romains. Parmi les trous qui ont livré du mobilier antique en calage, quatre appartiennent à un bâtiment rectangulaire de 27 x 17 pieds (7,98 x 5,03 m), soit une surface de 40,13 m2. Presque à l’emplacement du bâtiment, les trous de poteau non datés permettent de supposer l’existence de deux autres bâtiments un peu plus grands que le premier et orientés à environ 45° par rapport à lui. L’un aurait mesuré 30 x 24 pieds (8,87 x 7,10 m), soit 62,96 m2, et l’autre 21 x 31 pieds (6,21 x 9,17 m), soit 56,92 m2. Leur construction serait à faîtière porteuse. L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016 407 Sébastien JEANDEMANGE, Fabrice CHARLIER, Julian WIETHOLD, Jean-Denis LAFITTE Si les autres constructions sont régulièrement découvertes dans des tuileries gallo-romaines, surtout dans le nord-est de la Gaule, la présence d’une construction plus petite structurellement indépendante des autres est quasiment inédite. L’association de cette construction avec un puits et des fosses de préparation de la terre évoque certaines tuileries mises au jour à Rheinzabern et à Neupotz (Bade-Wurtemberg), mais les petits bâtiments y sont toujours accolés à une halle. La fonction de toutes ces constructions est probablement identique, mais la place de celles de Hombourg-Budange dans l’atelier évoque davantage celle d’un bâtiment qui igure dans la tuilerie-type représentée sur une des planches de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert et qui est explicitement dénommé « moulerie ». Il abrite non seulement le moulage mais une partie de la préparation de la terre et notamment une fosse de marchage. Il nous semble très crédible que les petites constructions successives de la zone D de Hombourg-Budange aient rempli la même fonction. 7.5. Évolution chronologique et restitution architecturale de la tuilerie L’interprétation fonctionnelle des zones est cohérente, même si pour certaines quelques-unes de nos restitutions et la distinction en plusieurs états restent largement ouvertes à la discussion. La juxtaposition des différentes zones de travail révèle une organisation parfaitement rationnelle de l’atelier, la chaîne opératoire pourrait être matérialisée simplement sur le plan par une lèche courbe qui relierait toutes les zones en allant du nord-est vers l’ouest. L’atelier a connu des transformations au cours du temps, dont certaines sont perceptibles dans telle ou telle zone, mais qu’il est dificile de corréler par manque de chronologie relative entre les zones. Néanmoins, la métrique et l’orientation des structures, ainsi que le fonctionnement habituel d’une tuilerie, permettent de se faire une idée de l’évolution du site. Comme deux zones semblent avoir connu trois états, nous proposons de distinguer trois périodes (ig. 12). La distribution chronologique des structures reprend la succession des fours et de la halle-galerie qui a été établie dans la zone A. Pour la zone B, comme la longueur de la halle de plan allongé de l’état B est égale aux grandes dimensions de la halle-galerie, nous supposons que les deux halles appartiennent à la même période. Mais comme son orientation est identique à celle du bâti à quatre poteaux qui abrite le four, nous considérons que cette halle de plan allongé a été construite dès la période 2 du site. À la période 1 correspond alors la halle 408 de l’état A. Quant à la zone D, une fosse a été rattachée à chacun des petits bâtiments selon leur proximité et chaque ensemble a été réparti sur les trois périodes, en estimant que le bâtiment qui mesure 27 x 17 pieds devait appartenir à la période 3 puisqu’il est orienté comme la halle-galerie. L’image de la tuilerie peut être complétée si l’on considère que les deux fossés qui ont été détectés lors du diagnostic (mais non documentés) constituaient la limite sud du site et que des haies de plantes épineuses pouvaient l’enclore comme le suggèrent les résultats de l’étude carpologique du puits. Selon ce découpage chronologique et nos hypothèses portant sur les dimensions des fours successifs, la capacité de production du site aurait été croissante : le volume interne du laboratoire serait passé de 13,24 m3 à 25,86 m3, puis à 50,50 m3, et la surface disponible sous la ou les halles de 159,48 m2 (sans la galerie en pignon) à 179,07 m2, puis à 374,93 m2 (halle de plan allongé + halle de plan centré, à l’exclusion de son côté sud qui couvre l’aire de service et devait abriter le combustible). Il est impossible de dater précisément l’installation de la tuilerie. La datation archéométrique la plus ancienne et cohérente nous est donnée par un charbon de bois qui serait à placer dans une fourchette chronologique de 2 sigma probalité comprise entre 45 av. et 121 ap. J.-C. (datation radiocarbone calibré, GrA-35462 : 1970 ± 35 BP). Il s’agirait d’un bois remployé puisque ce charbon a été recueilli dans le négatif du poteau 33 qui appartient au petit bâtiment que nous plaçons dans la période 3. La datation archéomagnétique réalisée sur le four fournit deux intervalles possibles pour la dernière cuisson : 115-155 et 275-295 ap. J.-C. Compte tenu de la datation radiocarbone de macrorestes végétaux du puits - entre 257 et 413- l’arrêt de la production est plutôt à placer dans la seconde moitié du IIIe siècle. CONCLUSION (S.J.) Une partie de la chaîne opératoire de l’artisanat de l’argile vient d’être présentée : un four ett son aire de serser vice, un système de drainage, protégés par une halle de plan centré, une halle de plan allongé, un puits maçonné, un bâtiment à quatre gros poteaux. La quasi-absence de mobilier céramique antique sur le site nous a incités à effectuer quelques datations archéométriques (archéomagnétisme et radiocarbone). En outre, des études archéo-botaniques nous éclairent sur les combustibles utilisés dans le four et sur l’environnement naturel de la tuilerie. Enin, une restitution en élévation a été réalisée et permet de mieux se représenter le site antique. Cette étude spatiale a envisagé trois états successifs de L’Antiquité tardive dans l’Est de de la Gaule, II, p. 389-409 (41e suppl. à la RAE) © SAE et SAC 2016. LA TUILERIE ANTIQUE DE HOMBOURG-BUDANGE (MOSELLE) constructions et de reconstructions de la tuilerie. Dans son dernier état, le four de plan rectangulaire présente une longueur externe de 8 m pour une largeur externe de 5 m (alandier et chambre de chauffe). Il servait notamment à cuire des tuiles (tegulae et imbrices) et de briques pariétales destinées à une utilisation locale. En revanche, certaines activités comme l’extraction ou la préparation de la pâte n’ont pas été repérées. L’occupation antique se poursuit au-delà du décapage, vers le sud, comme en témoignent les fossés orientées est-ouest et les quelques poteaux découverts lors du diagnostic (MANGIN, 2006), mais également vers l’ouest comme le démontre l’observation lacunaire de la halle-galerie. Ces indices antiques non décapés sont perdus pour la science archéologique car ils se situent dans l’emprise du projet immobilier. En replaçant cette fouille dans son contexte local, il est tentant de la mettre en relation avec l’atelier de sigillée prospecté depuis 1993 et situé 250 m à l’est. La parcelle de terre Guff Guff, située entre les deux ensembles (qui a fait l’objet d’un diagnostic archéologique en 1997 à la demande du Service régional de l’Archéologie de Lorraine) s’est avéré vierge de toute occupation humaine. Toutefois, les données chronologiques permettent d’envisager une contemporanéité des deux installations (IIe-Ve siècle ap. J.-C.). De ce fait, ne s’agirait-il pas d’un même ensemble artisanal qui se développerait sur une surface dont nous ignorons l’étendue ? À l’échelle régionale, cette fouille est une des rares investigations archéologiques entreprises sur ce type de structure d’artisanat de l’époque gallo-romaine. Remerciements Les auteurs remercient vivement Françoise Le Ny, maître de conférences à l’Université de Reims, pour la relecture de cet article. BIBLIOGRAPHIE nord de la rance et des régions voisines (Ptéridophytes et Spermatophytes), 5ème éd., Meise, éd. du Patrimoine du Jardin botanique national de Belgique, 1167 p. 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